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Les secrets d’un bon cours de musique

“Enseigner est la meilleure façon d’apprendre” ( Proverbe chinois )
J’aimerais aujourd’hui vous faire partager ces quelques réflexions, mûri au cours du long cheminement que représente mes vingt-cinq années d’enseignement. Je ne prétends bien évidemment pas détenir la vérité absolue, ni la recette miracle qui fera de vous le parfait professeur, mais ces quelques clefs pourront peut-être aider certains d’entre vous, spécialement les plus jeunes à construire leur parcours de pédagogue, ou en tout cas, à bien le débuter. Continuer à lire

Pour un bon cours de musique : aimer enseigner

Si je débute en abordant ce point précis qui peut apparaître comme une banale évidence, c’est qu’il n’en reste pas moins essentiel. Un bon enseignant est avant tout une personne qui aime enseigner, et qui apprécie l’idée de transmettre et de faire partager à ses élèves sa passion et son expérience. Car ne vous y trompez pas, un élève ressentira de manière claire, tôt ou tard, si la personne en face de lui brûle d’une réelle passion pour son instrument et sa discipline en s’investissant réellement dans ses cours de musique, ou si ce dernier n’est là que pour de simples raisons mercantiles.

Entendons-nous bien, je ne suis pas un philanthrope, la crise économique et la situation de plus en plus précaire de notre métier ne me permettent pas ce luxe, mais la démarche d’enseigner ne doit pas être, à mon avis, uniquement motivée par des considérations économiques.

Il est vrai que certains élèves vont vous renvoyer plus facilement que d’autres cette énergie et cette volonté de vous investir sans compter dans l’échange et le partage du savoir. Mais même si parfois les choses peuvent s’avérer délicates, et qu’il peut arriver que vous ressentiez une certaine forme de frustration face à un élève qui fait preuve d’un manque d’investissement, il est important de conserver calme, patience et pondération.

Trois qualités majeures et indispensables pour faire correctement passer votre message.

Structurer votre discours

Un autre point très important est de toujours savoir ce que vous allez développer durant votre cours de musique.

Même si l’expérience et l’habitude pourront avec le temps vous laisser une marge d’improvisation, il est toujours plus confortable, spécialement avec les niveaux avancés, d’avoir une trame ou au moins une idée de ce que vous aller proposer.

Votre étudiant a toujours besoin de sentir une clarté et une assurance dans votre discours, afin de vous permettre d’instaurer à terme une forme de respect, et de renforcer votre crédibilité.

Essayez d’être cohérent dans votre enseignement, en prenant le temps au début de chaque cours de musique de vérifier les points travaillés la semaine précédente. Là aussi, certains diront que nous sommes sur un lieu commun, mais combien de professeurs ont tendance à s’éparpiller en proposant trop de directions de travail différentes, sans aucun suivi, ce qui peut avoir pour conséquence de noyer votre élève sous un trop grand flot d’informations, et avec le temps, de le démotiver.

Savoir adapter son enseignement

A 25 ans, en tant que jeune professeur, j’avais une petite tendance à manquer de souplesse dans mon enseignement et à imposer une méthode un peu trop stéréotypée. L’expérience m’a fait prendre conscience de la nécessité de savoir adapter mon approche en fonctions de différents paramètres : l’âge de l’élève, son niveau, sa capacité de compréhension, son degré d’investissement et de motivation…

L’aspect psychologique est très important spécialement avec les jeunes enfants à qui il est parfois difficile de faire comprendre, tout en restant dans une démarche clairement ludique, que leur progression même lente, ne dépendra que de leur travail.

Il est utopique de penser que l’on aborde de la même manière trois élèves du même niveau à 8, 16, ou 35 ans. La faculté de compréhension n’est pas la même, le temps disponible pour la pratique instrumentale non plus, et la nature même du rapport humain avec l’élève sera différente. N’hésitez pas à le questionner afin d’obtenir des informations sur son cadre de vie, sa possibilité d’avoir accès ou non à un instrument pour travailler, son rythme scolaire ou de travail, ses plages de temps libre, tous ces renseignements vous aideront à adapter au mieux un programme sur mesure, qui évitera d’aller au delà des possibilités de chacun.

Mettre clairement le marché en mains

Les deux premières années d’études instrumentales sont primordiales, et le choix pour un batteur en herbe d’un professeur compétent qui saura le mettre sur de bons rails est toujours délicat et aléatoire.

N’ayant aucun repère, ni point de comparaisons, s’il a la chance de tomber sur la bonne personne qui sait lui transmettre des bases solides, rien ne pourra freiner sa progression. Si à l’inverse, son chemin croise celui d’un marchand de rêves, inapte et sans scrupules, les effets peuvent être catastrophiques et irréversibles.

Lorsque vous avez affaire à un élève débutant, mieux vaut lui mettre tout de suite et honnêtement le marché en mains, plutôt que de lui faire miroiter des rêves étoilés, stériles et chimériques. Par souci de clarté, je compare toujours l’apprentissage d’un instrument à celui d’une langue étrangère.

Prenons une personne ayant appris tant bien que mal par cœur quelques phrases d’allemand. Cette maigre connaissance fait-elle de cette personne quelqu’un qui peut prétendre parler allemand ? Non, bien entendu. De même, est-ce qu’une personne qui aura appris par mimétisme et de manière approximative, quelques rythmes de base, peut se considérer comme un batteur crédible ? Même réponse ! Faites donc bien comprendre, de manière claire, sans aucune volonté d’effrayer votre interlocuteur, que de la même manière qu’un étudiant désirant s’immerger sérieusement dans l’apprentissage d’une nouvelle langue, devra immanquablement passer par des bases de grammaire, conjugaison, vocabulaire…, un apprenti batteur devra acquérir de la même façon des bases de solfège indispensables à une progression lente certes, mais qui s’inscrira dans la durée.

S’il vous arrive de croiser un élève (le plus souvent adulte) ne désirant pas s’investir dans un apprentissage long et contraignant, préférant une transmission orale plus ludique et superficielle, à vous d’accepter ou de refuser, l’important restant que le contrat entre vous deux soit clair et sans ambiguïtés.

Ne pas lutter contre le facteur temps

Tout apprentissage, peu importe la discipline, demande patience, travail et surtout de nombreuses années de pratique. Nous pouvons tourner le problème dans tous les sens, l’élève à besoin de temps pour comprendre, travailler, puis digérer les informations apprises lors des cours de musique.

Certains, trop impatients, auront tendance a vouloir griller les étapes afin de gagner du temps et, le pensent-ils, d’accélérer leur progression. Là encore, le rôle d’un professeur honnête sera de leur faire prendre conscience qu’il n’est pas un disciple de David Copperfield, et que les raccourcis sont inutiles car le temps qu’ils auraient l’impression d’avoir gagner sur le moment, sera reperdu le jour où ils seront contraints de revenir en arrière du fait d’une mauvaise assimilation. Donnez-leur l’exemple d’un architecte qui à pour projet de construire un gratte-ciel de 150 étages. Si les fondations sont solides et que chaque étage est abordé en respectant scrupuleusement le cahier des charges, notre homme n’aura aucun problème pour terminer sa construction, et pour en faire un ouvrage pérenne.

A l’inverse, si les normes ne sont pas respectées, que les délais sont bousculés, et que le travail est bâclé, on peut malheureusement craindre de mauvaises surprises sur la durée.

Rigueur, exigence mais pas de rigidité

Pour conclure, j’aimerais parler de la bonne attitude à observer face à un élève. Là aussi, il est parfois difficile de régler le curseur au niveau idéal, chaque profil se révélant différent et très particulier. Certains attendront de vous une profonde rigueur sans aucune complaisance, d’autre plus de souplesse et de compréhension, enfin certains auront tendance à prendre votre cours pour une réunion de vieux potes au café du coin.

Il est très délicat de conseiller un positionnement précis et définitif, chaque professeur réagissant en fonction de sa personnalité, de sa sensibilité et de son expérience.

En ce qui me concerne, à part quelques cas très rares de relations privilégiés qui se sont tissées sur plusieurs années, j’ai toujours tenté de préserver une certaine distance avec mes élèves, non pas par prétention ou suffisance bien évidemment, mais simplement par souci de conserver une forme de respect, indispensable pour mener à bien la mission pour laquelle on me paie.

Article publié en septembre 2013 dans Batteur Magazine par Laurent Paranthoën, professeur de batterie chez icm.

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