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Le programme de l’examen de piano 2021

Les examens d’icm 2021 approchent. Voici une sélection de trois œuvres très différentes et représentatives des qualités que l’élève devra assimiler au cours de son cursus musical. Le mot technique est souvent mal compris et souvent assimilé à bouger les doigts rapidement. Jouer lentement n’est pas moins technique que jouer rapidement. Avoir un beau son, acquérir une bonne indépendance des mains, avoir la faculté de se transposer dans un élément poétique : tout cela, c’est de la technique ! On pourrait dire que la véritable technique est la compréhension de ce que la technique est : savoir comment travailler, être régulier dans son travail, tout cela est également de la technique. Continuer à lire

Andantino de Aram Khatchatourian

Les pianistes ont bien de la chance d’avoir une si belle œuvre à se mettre sous les doigts dès les premières années de piano. Le titre du morceau, Andantino, désigne un tempo un peu plus rapide qu’andante. L’indication quatre-vingt à la noire est un ordre d’idée. Il peut être joué au piano légèrement plus lentement mais pas trop lentement. Pourquoi ? C’est une des difficultés du morceau : l’accompagnement de la main gauche entièrement en noires, ne doit pas être joué « haché ».

Explication décryptée

Les quatre noires par mesure sont liées en même temps d’être légèrement « soutenues » ou « tenuto » (le petit trait indiqué au-dessus de chaque note). Cela signifie que la main gauche est un battement. C’est une pulsation qui doit soutenir la mélodie à la main droite, mais pas d’une manière rigide. On doit donc sentir cette pulsation dans un même geste, dans une continuité, et non pas « un » puis « deux » puis « trois » puis « quatre ». Ce flux de la main gauche, ne peut être obtenu dans un tempo trop lent. C’est pourquoi l’œuvre est un Andantino et non pas un Andante !

Vous pouvez considérer que la nuance indiquée est valable pour la main droite. La main gauche doit bien sur être présente, mais il faut obtenir une nuance nettement moins forte que la main droite, qui elle, doit se détacher clairement de l’accompagnement. La droite joue un chant nostalgique, une sorte de douce plainte aux contours bien nets.

A la mesure 18, l’accompagnement change et devient syncopé. La régularité et le tempo ne doivent pas en être affectés, et la nuance doit rester douce, pour que le chant de la main droite soit limpide. D’une façon générale, pensez à caresser le piano, pas de heurts dans cette pièce ! C’est un morceau très intime dans lequel vous pourrez montrer votre sensibilité. La meilleure façon de le jouer au piano est « simplement ». Ne rajoutez pas de manières inutiles, la musique est tellement belle, qu’il suffit de la jouer… …simplement.

Pour les plus téméraires…

Pour les plus motivés, il est possible de commencer à travailler un peu le rubato. C’est-à-dire, une fois que l’élève pourra jouer parfaitement en rythme, le professeur montrera comment apporter de légères fluctuations de rythme pour faire vivre la musique : retenir certaines notes, avancer un peu plus dans la musique, mais tout en gardant une unité dans la pulsation.

Regardez Andantino par le compositeur lui-même ! (il ne joue pas la première mesure) :

La version de Lang Lang (légèrement maniérée mais beau son) :

Petite note : sur certaines éditions, à la mesure 8, 3ème temps à la main gauche, la tierce est notée fa-la bécarre. Il semble que cela soit une erreur, la tierce est bien fa-la bémol.

The Little Shepherd de Claude Debussy

Cinquième pièce des Children’s Corner, suite de six pièces, composée de 1906 à 1908, et dédiée à sa fille Chouchou. C’est une sorte de parenthèse dans la vie de Debussy qui commencera juste après l’écriture des 24 Préludes pour piano. Des titres en anglais pour cette suite ? Simplement parce que la fille de Debussy connaissait sûrement quelques mots d’anglais, ayant une nounou anglaise, et qu’elle aimait les images anglaises.

Ce morceau doit servir à l’élève pour aborder l’élément poétique en musique. Nous pouvons mettre en évidence trois éléments importants :

1. L’arabesque ou le rêve

Les quatre premières mesures sont une mélodie libre sans accompagnement. Cette phrase musicale est le langage debussyste par excellence. Ce langage quasi improvisé est celui du berger qui joue de la flûte au gré de ses états d’âme. C’est un langage « inspiré », qui vient « naturellement », c’est un langage libre. Ecoutez Syrinx pour flute, le Prélude à l’Après-midi d’un faune, ou la Fille aux Cheveux de Lin, pour vous familiariser avec cette arabesque debussyste. Ces premières mesures, une fois le rythme compris, doivent être « rêvées » et jouées avec la plus grande souplesse : transposez-vous dans une ambiance, une atmosphère, un tableau. Le morceau est en La majeur, mais à ce stade de l’œuvre de piano, impossible de dire dans quelle tonalité nous nous trouvons, il n’y a pas de socle tonal, ce qui contribue à cette atmosphère de rêve un peu éthérée.

2. La fraîche nostalgie et l’élément fuyant

A partir de la mesure 5 « plus mouvementé », et jusqu’à la mesure 8, nous avons un autre motif qui rappelle énormément l’Isle Joyeuse, mais dans une version mélancolique. C’est un motif rapide, léger et insouciant, mais en même temps nostalgique. Les intervalles de seconde à la main gauche renforcent cette tension.

Ici, nous ne sommes pas dans quelque chose de franchement joyeux : plutôt un sentiment d’innocence, de fraîcheur, mais assombri de frottements de secondes, et des fins de phrases qui « retombent » (do# ré si). Citons Vladimir Jankélévitch à propos de cet élément fuyant : « Les formes qui se reforment sont continuellement englouties dans le chaos de l’amorphe ; les formes naissantes fondent, aussitôt nées, dans l’universelle déliquescence. » (Debussy et le Mystère de l’Instant). Nous observons ce principe dans cette œuvre en générale : une forme naît, puis disparaît, il y a du mouvement, puis une stagnation ou une disparition. Le pianiste doit avoir cela en conscience, comme s’il devait insuffler de la vie dans une phrase, puis s’en retirer.

3. L’élément tonal ou l’élément reposant

Le premier sentiment de tonalité apparaît fin de la mesure 8 début de la mesure 9, puis s’installe mesure 10 avec un bel accord de La majeur. Enfin un sentiment de repos s’installe après tous ces éléments fuyants ! Debussy ne fuit pas la tonalité, il l’assume entièrement, mais prend le temps pour la dévoiler. Il enrichit ainsi considérablement son rôle, et créer des ambiances que la musique n’avait pas connu jusqu’à là. Nous utilisons le même procédé mesure 17, mais cette fois-ci en Mi majeur, puis à la toute fin, à nouveau en La majeur. La Fille aux Cheveux de Lin a recours à ce procédé également.

Mettre de la pédale ou pas ?

Beaucoup de versions de cette œuvre de piano existent avec plus ou moins de pédale. Peut-être serait-il bien d’en mettre le moins possible pour conserver des lignes claires. Les passages où il est possible d’en mettre sont :

  • mesures 3 et 4 pour soutenir les différents ré. Bien soulever et remettre la pédale à chaque ré, avec une demi-pédale, voir un quart de pédale. Debussy utilise ici l’écriture d’un instrument à vent qui peut changer de nuance sur une même note. Vous pianiste, vous ne pouvez pas faire un crescendo sur une note tenue (le mi-ré). Par contre, vous pouvez sur le fa-ré mezzo forte, changer la pédale, puis la remettre sans lâcher la note : cela aura pour effet de baisser soudainement le volume. Si vous avez un clavier numérique, l’effet ne marchera pas : faites simplement le fa-ré piano légèrement accentué, le fa-ré mezzo forte, et le sol-fa-ré piano.
  • l’enchaînement de la mesure 8 à la mesure 9 : pour lier la main gauche de l’accord do#-mi à si-la.
  • bien sûr aux mesures 10, 17 et 30 : pour tenir les accords.
  • avec parcimonie aux mesures 24 et 25 pour « aider » un peu, et mesures 14 et 15.

Le tempo est assez libre, mais pas trop lent. C’est une œuvre très légère et spontanée, et les éléments « retombants » de fin de phrases ne prendrons tout leur sens que si la musique « avance » au préalable. Créez des contrastes, créez des couleurs ! Lisez bien toutes les indications de tempo : « très modéré », « plus mouvementé », « cédez », etc. et travaillez les enchaînements de tempo, cela ne s’improvise pas !

Une très belle version lente de Menahem Pressler :

Une version plus rapide par Vladimir Horowitz :

Ballade en sol mineur op. 118 de Brahms

Voici une œuvre de piano bien énergique qui vous donnera du fil à retordre, et vous donnera l’occasion de renforcer vos mains. Si vous avez encore les mains qui s’écrasent, c’est le moment de prendre de bonnes résolutions : la main doit impérativement être très bombée, comme si vous aviez une petite balle dans votre paume, les doigts parfaitement droits, et les phalanges solides.

Décryptage du morceau

Le morceau commence par une anacrouse avec des accords de sixte à la main droite. Ne partez pas sur les chapeaux de roues ! Au contraire, vous pouvez démarrer un peu en dessous du tempo, pour prendre le temps de poser ce départ un peu risqué. La 2ème croche de l’anacrouse (l’accord la-do-fa#) doit être plus arrachée que la première croche. Puis le 1er temps de la première mesure (sib-ré-sol) doit être accentué. Nous avons dès le départ, un modèle de travail pour tout le morceau. A chaque fois que vous aurez ces deux accords en croches staccato suivi du 1er temps de la mesure suivante en blanche tenue, vous pourrez le travailler ainsi :

  • 1er accord en croche : staccato en restant près du clavier.
  • 2ème accord en croche : staccato en arrachant. Imaginez que vous arrachez littéralement l’accord du clavier. Votre main doit se retrouver en hauteur. C’est le fait d’ « arracher » qui vous « propulse » un peu plus haut. Vous ne devez pas jouer puis arracher, mais arracher et jouer sont un même geste.
  • 3ème accord ou arrivée sur blanche : accentué, mais pas en donnant un coup brutal. A ce moment précis, votre main est en hauteur après avoir joué le 2ème accord. Il ne vous reste plus qu’à laisser tomber votre main, et l’accent se fera avec le poids naturel du corps. Surtout ne forcez pas l’accent ! Bien sûr, cela sous-entend que votre main est parfaitement solide.

En résumé, pensez : staccato, staccato arraché, puis laissez retomber la main naturellement.

L’entraînement

Exagérez au début les gestes dans votre travail, puis quand vous les aurez assimilés, ils vont se fondre naturellement dans votre jeu. Renforcez votre main dans la lenteur. Travaillez souvent très lentement. Une autre difficulté est de faire ressortir le thème qui est aux notes supérieures des accords de la main droite : mi fa# sol – fa mib ré – do ré sib – do lab – sib sol – lab – ré etc.

Le travail des accords

Vous pouvez travailler les accords en tenant la note du haut avec du poids, et en lâchant le bas de l’accord sans poids. La note du haut doit toujours bien résonner. Renforcez votre cinquième doigt qui doit être en béton !

Pour les basses à la main gauche, elles doivent être profondes, mais encore une fois, jamais brutales ! La pédale n’est pas mise sur l’anacrouse, et ensuite, elle peut être mise une fois tous les temps pendant ½ temps (petit rappel : la mesure est à 2 temps, donc 1 temps=1 blanche, ½ temps= 1 noire). Il s’agit d’un principe général, bien sûr, vous pouvez adapter. Mais attention à ce que l’œuvre ne devienne pas trop lourde, ni par le volume sonore, ni par trop de pédale qui « noie » le morceau. Même à la mesure 5 qui reste sur un accord de Ré majeur, changez plusieurs fois la pédale (avec des ½ pédales) pour que les accords staccato ne soient pas submergés.

A la mesure 32, bien faire entendre le Sol tenu en ronde, puis faire ressortir le haut des accords de la main gauche. Ainsi il est intéressant de faire entendre : Sol à la main droite, puis si bécarre, ré à la main gauche, puis fa bécarre blanche à la main droite, et ce, jusqu’à la mesure 37 comprise. L’intérêt est de donner un petit rôle à la main gauche dans le dessin thématique. La pédale peut être mise légèrement sur le 1er temps, puis sur la blanche au 2ème temps.

Le passage central

Le passage central en Si majeur doit être joué avec la pédale douce (la pédale de gauche) « una corda ». Cela permet de jouer avec un peu plus de poids à la main droite pour adhérer au clavier, tout en ayant un son bien doux. Faire ressortir la note du haut à la main droite. La main gauche doit « glisser » tout en souplesse. La pédale peut être mise sur le 1er temps et retirée sur la quatrième croche (avec la queue en haut à la main gauche). Elle peut être remise sur la 2ème croche du 2ème groupe de croches (la 6ème croche).

Vous pouvez travaillez en complément à cette ballade, l’exercice n°34 des 51 exercices du même compositeur. Cela permettra de renforcer le 5e doigt de la main droite, la main en général pour les accords, et vérifier que la main est bien ronde.

Une très belle version de Wilhem Kempff :

C’est la fin de l’année, êtes-vous prêt.e pour l’examen de piano ICM ?

Bon travail !

piano examens de fin d'année événement icm

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